« BABEL » : DES ETOILES PLEIN LES YEUX

Babel – Mourad Merzouki – Le Bon Marché Rive Gauche, Paris – Jusqu’au 31 décembre 2025.

Les yeux s’écarquillent, les mâchoires se décrochent : Babel ne cesse de surprendre, l’émerveillement va croissant, comme un esprit de Noël avant l’heure. Le lieu est magique : se faufiler dans les allées du Bon Marché après la fermeture du grand magasin pour gagner son siège au centre d’un espace majestueux tient du conte de fée. Dix artistes exceptionnels enchainent danses et acrobaties au cœur d’un univers poétique merveilleux. Le créateur du spectacle, Mourad Merzouki, n’en est pas à son premier fait d’armes : de Pixel à Zéphyr en passant par Folia, son inventivité ne connait aucune limite. Le mythe de Babel lui offre un fil conducteur solide pour un spectacle époustouflant. Une grande réussite !

Une tourelle surplombe une structure métallique qui abrite des escaliers sans fin. L’ambiance est rouge ocre, sombre et inquiétante, avec un univers qui rappelle celui de La cité des enfants perdus, de Jeunet et Caro. Qui sont ces rescapés aux visages tendus qui se pressent dans les escaliers de la tour, ne cessent de grimper pour retomber ensuite ? La musique de Marc Debard mêle synthé, violon, classique et boucles électroniques et donne un élan irrésistible au spectacle.

Babel suit une progression précise, qui part de la danse pour ensuite introduire les arts du cirque (mât chinois, cerceau, tissus, sangle) avant de revenir sur la terre ferme. A chaque étape, la tour change de forme, s’allonge comme un vaisseau spatial, se redessine dans les lumières sculptées. A l’humanité qui se bat pour survivre succèdent des faits d’armes précis et lumineux, des singularités à la beauté salvatrice. Le numéro des cerceaux est particulièrement touchant, irréel et magique, avec ces deux silhouettes chacune sur leur accessoire qui enchainent les poses les plus folles, flirtent avec le public en se balançant dans les airs. Tissus et sangles sont tout aussi fascinants. La lumière se fait sur les corps, qui quittent leurs vêtements bruns et rouges de réfugiés pour adopter un jaune seyant. Les visages s’apaisent dans la beauté.

Après une séquence de sangles à tous les étages, où les dix corps se projettent aux fenêtres de la tour, le final se fait en dansant sur le plateau. Le hip-hop n’est jamais loin et les mouvements de troupe sont puissants. Le public applaudit debout un spectacle hors norme qui a toute la magie des fêtes.

Emmanuelle Picard

Photos Julie Cherki

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