MON LAFERTE, LA CHILIENNE PIQUANTE QUI SE RÉGÉNÈRE DANS LE JAZZ

MUSIQUES. MON LAFERTE, La Pop chanteuse chilienne hot et spicy, se réinvente dans le cabaret-Jazz. Dernier album : « Femme fatale » (Sony US Latin, sorti fin octobre 2025). 

Avec Femme Fatale, son neuvième album qui vient de sortir, la star chilienne, dont le premier nom de scène fut Montserat Biustamente et désormais pour le monde entier Mon Laferte, après avoir exploré le métal, le rock alternatif, la Pop et l’Electro dans son brillant précédent opus Autopoiética, fait une incursion remarquée dans le Jazz.

Ce neuvième opus revisite le jazz version cabaret nocturne. Dans titre le Femme fatale, qui a donné son nom à l’album, “elle avertit qu’elle apporte le chaos comme une promesse et qu’elle désire voir le monde brûler”, analyse El País. Le titre suivant, Mi hombre, est une version espagnole de My Man, le classique indémodable interprété notamment par l’Américaine Billie Holiday, qui évoque une relation toxique. « Elle s’identifie à la figure de la femme fatale, un personnage qui lui va comme un gant de satin, dans un mélange de puissance et de vulnérabilité”, écrit le quotidien chilien La Tercera.

Mon Laferte est entrée dans une nouvelle phase avec la sortie de Femme Fatale, premier album sous label Sony US Latin. Avec des morceaux emblématiques comme Otra Noche de Llorar, Esto Es Amor ou encore La Tirana, Mon Laferte signe un grand album qui fera date.

Femme Fatale est un voyage intime à travers ses anciennes amours, chargé d’émotion, un disque marqué par des thèmes d’autonomisation et de maturité émotionnelle, dont la musicalité s’exprime aussi dans l’instrumental et les arrangements. Selon El País, plusieurs titres “rappellent l’orchestration ou les arrangements pop également utilisés par les chanteuses françaises et italiennes des années 1960”. Un disque lumineux et sensuel, un album qui marquera la carrière déjà longue d’une artiste maintenant au sommet de son art.

La chanteuse chilienne a souvent été décrite par les médias comme une femme fatale, ce qu’elle assume désormais pleinement, apparemment ravie de ce qualificatif qui pourrait pour d’autres paraître discriminant.

Comme elle l’exprime dans le Los Angeles Times,J’en suis venue à la conclusion qu’on me percevait comme une femme vraiment libérée – c’est pourquoi c’est dangereux. Je suis une personne sûre d’elle et cela provoque beaucoup d’insécurité chez les autres.” Considérant son art comme une expression politique, un trait commun à beaucoup d’artistes chiliens et du continent sud-américain, elle affirme cet engagement à travers la chanson, et son dernier opus en particulier : “Je pense que ce sont les paroles les plus difficiles que j’aie écrites. J’aborde une foule de microsujets, comme la masturbation, les orgasmes simulés, et je pense que nous sommes nombreuses à être concernées”, continue t-elle.

L’autrice-compositrice et interprète, née Norma Monserrat Bustamante Laferte en 1983 à Viña del Mar au Chili, (entre Norma et Montserrat, on sent des parents férus d’Opéra…) a commencé à chanter et à jouer de la guitare dès l’enfance, et à 13 ans à peine, a remporté un concours régional de talents puis a étudié au conservatoire de musique local, pour ensuite choisir de faire ses premières armes en jouant dans les bars et les salles de spectacle de la région. Elle se produit alors et enregistre sous le nom de Monserrat Bustamante puis s’installe à Mexico où elle intègre un groupe de métal féminin appelé Mystica Girls, avant de se lancer en solo.

Féministe engagée, politisée, Mon Laferte ne passe pas inaperçue, dans son pays comme dans toute l’Amérique latine. Ses textes sexualisés, comme ceux de son dernier album, en font une égérie pour les mouvements féministes et les femmes en général, contraintes par un machisme qui n’a rien de folklorique dans cette partie du monde, un travers culturel que les jeunes femmes subissent depuis des générations. Le Chili est aussi le pays des pires gouvernances, celui de la tristement célèbre dictature de Pinochet des années 70 et désormais, depuis quelques jours à peine, celui de l’élection d’un président d’extrême-droite, xénophobe et ultra-nationaliste, ouvertement nostalgique du pinochisme, grand admirateur de Trump, sont là pour attester de cette dérive dictatoriale, liberticide, profondément machiste et misogyne, inscrite dans l’ADN et l’histoire récente du Chili.

Mais le Chili n’a hélas par l’exclusivité de ces travers propres à l’extrême-droite. Comme partout dans les autres dictatures ou quasi dictatures, chez les Erdogan, Sissi, Milei, Poutine, Netanyahu, Trump, Xi, Orban et tant d’autres liberticides, ce sont les mêmes rouages  idéologiques qui conduisent à l’oppression et la soumission du peuple. Mais, face à cela, ce sont les artistes, les écrivains, les intellectuels et les journalistes qui résistent. Depuis toujours, ce sont celles-là et ceux-là qui se sont relevés, rebellés, ont fait savoir au monde l’abjection du joug qui les étreint et les étouffe. On peut juguler un peuple tout entier, l’enfermer et le réprimer, mais on ne peut pas asphyxier les cerveaux ni annihiler les coeurs. Les tyrans feraient mieux de s’en souvenir. Face à l’Art et à la pensée, qui ne sont que liberté et lumière, les obscurantistes et les fascistes de tout poil perdront toujours.

Mon Laferte est de cette trempe d’artistes là. De celles qui refusent de se soumettre. Une artiste décidée, engagée, et éminemment libre.

Marc Roudier

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